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 le 5 octobre 1789

le 5 octobre 1789

03-10-2018 à 06:19:00

 

Versailles, le 7 octobre 1789

 

Mon cher Joseph,

C’est du château abandonné que je t’écris cette lettre après les journées de folie que nous venons de vivre… Le roi est parti et nous ne sommes plus que quelques gardes présents ici. Nous ne rejoindrons la famille royale aux Tuileries que dans deux jours.

Tout s’est passé très vite. L’atmosphère était lourde depuis plusieurs semaines. Après les événements de cet été – états généraux, prise de la Bastille, abolition des privilèges – les rumeurs allaient bon train. Les différents agitateurs parisiens et leurs journaux, en particulier L’Ami du peuple de Marat, faisaient courir le bruit que l’Assemblée allait être transférée en province, que le roi massait des troupes autour de Versailles. De plus, le peuple était mécontent à cause de la hausse du prix du pain. La moindre étincelle pouvait relancer l’incendie révolutionnaire.

Aussi quand nous avons fêté par un grand banquet, au début du mois, l’arrivée au château du régiment des Flandres, les réactions n’ont pas tardé. La populace, influencée par les meneurs révolutionnaire, nous a reproché d’avoir acclamé la famille royale, d’avoir arboré la cocarde noire de la reine Marie-Antoinette et d’avoir foulé au pied la cocarde tricolore…

Près de 20 000 Parisiens se sont alors rassemblés, venant des quartiers populaires et ont pris la route de Versailles pour aller chercher le roi que l’on disait aux mains du « parti aristocrate ». On sait que, dans la nuit, des agents du duc d’Orléans avaient battu le pavé parisien pour préparer cette manifestation, pas si improvisée que cela, et pousser le peuple à aller jusqu’à Versailles… Ce sont les femmes parisiennes qui sont arrivées les premières au petit matin du 5 octobre. Le roi reçoit même une petite délégation à laquelle il promet du pain et du blé, pensant ainsi calmer les esprits. Mais la foule s’installe sur le parvis du château, reste sur place et passe la nuit. Et le lendemain matin, à l’aube, la violence se déchaîne : la foule envahit le château, tuant deux gardes, qui tentaient de s’y opposer, et force la chambre de la Reine qui se réfugie avec ses enfants dans les appartements de Louis XVI. Monsieur de Lafayette, chef de la garde nationale, conseille alors au roi de se montrer avec sa famille au balcon pour apaiser la violence. C’est alors que s’est produite une chose extraordinaire : le peuple, jusque-là hostile, s’est mis à acclamer le roi, montrant ainsi son vieil attachement à la monarchie séculaire et à la famille royale. Mais la foule réclamait toujours le départ du roi pour Paris. Alors le bon Louis XVI a cédé. On a vu alors se former le plus étrange des cortèges : le roi, la reine et le Dauphin – « le boulanger, la boulangère et le petit mitron » – encadrés par Lafayette et ses gardes nationaux, au milieu de la populace qui brandissait des piques avec du pain… et les têtes des gardes massacrés. 

Le roi est ainsi arrivé au palais des Tuileries. Mais nous craignons qu’il ne soit maintenant prisonnier du peuple de Paris, si bien manipulé par les révolutionnaires les plus extrémistes.

Je crains, mon cher Joseph, que ce ne soit que le début d’une période tragique. Jusqu’où ira cette folie ?

Sois prudent et que Dieu te bénisse.

Hugues, sergent aux gardes françaises

 

 

 

Actuailes n° 89 – 3 octobre 2018

 

 

 

 

 

 


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